La MF Racing

Nous sommes le 22 novembre 2014 et l’alerte sur « Le Bon Coin » de la mise en vente d’un cadre de MF650 m’interpelle. L’annonce est agrémentée d’une photo montrant le cadre nu, posé à même le sol sans fourche ni aucun accessoire. Le vendeur est à deux encablures de ma prochaine destination… l’affaire est conclue dans le week-end.

Je conserve depuis plusieurs années bon nombre de pièces MF dans l’atelier : comme beaucoup d’entre nous, je les ai récupérées au fil du temps, avec l’idée qu’elles peuvent servir un jour de pièces de rechange ou encore dépanner un MFiste. Mais voilà qu’un jour de nettoyage, je me rends compte que l’essentiel est là pour remonter une machine.

J’appelle donc mon copain Daniel qui flaire rapidement chez son beau père une piste pour l’élément manquant : le moteur Citroën ! Nous reviendrons avec… 2 moteurs de Visa 652cc.

Notre intérêt se portant sur les courses à l’ancienne, commence alors pendant les mauvais jours une longue recherche sur les préparations des machines coursifiées des années 80. Nous tenons à ce que la moto soit toujours une MF dans ses formes principales. Avec sa carrosserie si particulière, nous avons quelques idées.

Rapidement se pose la question de la performance. L’ambition est au plus haut : la monture doit pouvoir flirter avec les R75 du Bol d’Or Classic de 2012. Il nous faut donc un moteur d’endurance avec un bon rapport couple/puissance.

Nous savons que la vitesse de pointe restera limitée avec l’ensemble boîte-pont d’origine emprunté à la Guzzi V50. Nous devons cependant composer avec cette contrainte pour un temps. Des données de performance sont disponibles grâce aux connaissances de Filip Van Gool de VGS qui fait des courses de 2cv à Francorchamps. On discute sur tous les paramètres, mécanique, hydraulique, carburation, allumage etc.

Nous voulons optimiser l’un des 2 moteurs avec un régime capable d’atteindre 8 000 trs/mn. C’est donc parti pour une nouvelle vague de recherches. Heureusement les pros sont là pour nous aider : vilebrequin, arbre à cames, alésage en limite à 720cc, pistons, bielles, ressorts de soupapes, culasses rejointées… du lours ou la sanction tombe : il faut revenir aux carters moteur de la 2cv 602cc et ne pas garder ceux du 652cc plus fragiles… il ne restera plus grand chose du moteur de Visa.

Entre temps, une visite opportune à la bourse aux pièces de Reggio (Italie) nous permettra de compléter les pièces encore nécessaires : un embrayage complet, une paire de carburateurs PHM 40 Dell’Orto (cylindrée x régime obligent) avec pompe de reprise, une coque arrière, un bracelet, des disques de frein, le tout dans le style de l’époque. L’épisode restera en mémoire avec au retour une plaque d’acier sur l’autoroute qui va nous lacérer les pneus et retarder au point de se voir bloqués à l’entrée du tunnel de Fréjus tout juste fermé ; heureusement Daniel avait sa trousse de secours de victuailles auvergnates…

On ne compte pas les nuits passées dans l’atelier sur des opérations innatendues comme ce couvercle d’embrayage qui devra être soudé puis repercé pour adapter le vilebrequin modifié ! Douze mois plus tard, l’aventure peut enfin commencer : les 1eres pièces fraichement sorties de peinture sont assemblées. La moto arborera une livrée bleue et jaune, aux couleurs du club de rugby de l’ASM fièrement soutenu par Daniel.

Nous fabriquons des tubulures spécifiques pour l’admission et pour l’échappement. Pour la sécurité, nous avons pris soin de ne plus croiser les deux à proximité, contrairement au montage d’origine. Les carbus seront dégagés vers l’extérieur pour permettre le bon positionnement des commandes au pied… ce qui confère au moteur un aspect plutôt original. Des manchons en caoutchouc de filtre à air de Renault Dauphine seront utilisés pour le montage « souple » des carburateurs !

Toute la mécanique est étudiée pour être démontée facilement et rapidement dans la limite de nos moyens. L’électricité sera simplifiée au maximum jusqu’à l’allumage 123 qui alimente une bobine super haute tension (non homologuée…) produisant des étincelles à faire pâlir les électrodes des BP8 EFS ! Les freins sont inchangés, toujours en P05, avec seulement les disques ventilés de Reggio. La partie cycle est, elle aussi, d’origine si ce n’est un arceau rajouté en guise de support de coque assurant aussi la rigidité de la boucle arrière.

La bête devient belle et se forge une allure racée… racing quoi ! Son nom est donc tout trouvé : ce sera la MF Racing. Un petit logo MF modifié sera même apposé pour officialiser l’appellation au moment où se font les 1ers essais au banc. Grosse déception, le moteur pourtant testé avant ne donne guère plus de puissance que l’origine et en plus il chauffe : l’avance est pourtant bonne mais la combustion accuse trop d’air : passage en revue de la boîte de gicleur et essais de différents indices thermiques sur les bougies pour éviter de percer un piston !

Le 7 avril 2016 sera la 1ere sortie pour un roulage sur le circuit du Bourbonnais. Nous sommes prudents car il s’agit avant tout de confirmer que nous ne prenons pas de risque majeur. Quelques pannes nous alertent, notamment la courroie de l’alternateur dont un roulement est en train de gripper. Mais la sortie se passe bien, tout fonctionne normalement.

Il reste que ça pétarade beaucoup à partir de 5 500 trs/mn, bien loin des 7 500… on rajoute 5/100 de jeu aux soupapes, tout ça va dans la bonne direction. Une sortie sur le circuit d’Issoire pour sa ligne droite confirmera mais avec à la clé une panne sèche et c’est Dominique Sarron en personne qui viendra nous tracter avec son quad de piste : la MF Racing fait du 25 litres au cent !!!

Bon… certains se moquent un peu sur les circuits où les questions fusent avant de voir la bête sur la piste comme ce jour où un commissaire de piste nous soupçonne et nous pointe du doigt pour une tige filetée trouvée sur la piste… mais non, pas de montage sauvage chez nous !!! 🙂

Nous avons juste le temps nécessaire pour honorer notre inscription aux Coupes Moto Légende sur le circuit de Dijon Presnois. La ligne droite sera longue mais la MF Racing est d’une agilité incroyable, même si la fourche Paioli de 35mm bouge un peu malgré l’amortisseur de direction. Le we sera un beau couronnement de nos efforts et les encouragements des membres de club BFG -qui héberge aussi les MF- seront au top ! Reste qu’un seul d’entre nous aura pu courir… la montée du Mont Ventoux avec, non loin de nous, Max et sa BFG fera aussi causer… les cousines françaises sont en force sur le terrain !

Quelque temps plus tard, retour sur la table d’opération et sur le banc. Là on optimise avec des boisseaux, des puits, des aiguilles, des synchros, ici on avance/recule par demi-degré, on reprend les jeux… en mesurant la performance, les températures, notant chaque réglage et ses effets. C’est le long chapitre de la mise au point qui, au final, prendra plusieurs mois. Certains soirs sont à manger son chapeau et d’autres à sortir un nouveau carton de bières La Lubie, de notre ami brasseur Adrien Blondel, qui nous permet des perfusions à toute heure…

Nous sommes plutôt contents des derniers réglages : l’ultime mesure au banc indiquera 61cv au vilebrequin ! Prêts à affronter une nouvelle saison pour sûr ! Mais… il nous faudrait une seconde bête de course !!!

Toute leur histoire et plus d’illustrations sur :
            -le forum BFG : www.bfg.asso.fr
            -les blogs respectifs : mfracing.blogspot.com et bfg1300racing.blogspot.com
            -le mur G&G : www.pinterest.fr/whiteswan6300/gg-racing-team-moto/

Michel Picandet / Daniel Ranvier

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